Deux infirmiers du centre hospitalier Sainte-Marie de Rodez ont obtenu leur diplôme d’État d’Infirmier en pratique avancée (IPA) en juillet dernier. Rencontre avec eux pour évoquer cette nouvelle formation et leurs futures missions.

 

Avant toute chose, pouvez-vous vous présenter ?

Charlotte Marty : J’ai été formée à l’IFSI de Rodez, suis entrée au CHSM il y a huit ans et fais actuellement partie de l’Équipe mobile de géronto-psychiatrie (EMGP).

Florian Charrier : Je suis diplômé de l’IFSI de Mende, ai intégré le CHSM il y a six ans et travaille sur le secteur G02.

 

Pourquoi avez-vous choisi de suivre cette formation d’Infirmier en pratique avancée (IPA) ?

C. M. : Pour évoluer dans la pratique de mon métier, élargir mes compétences.

F. C. : Oui et aussi pour casser la routine, découvrir quelque chose de nouveau. Le diplôme d’État d’IPA correspond à un Master 2, c’est-à-dire à un niveau bac+5. Dans le cadre de ce cursus universitaire, nous pourrions poursuivre vers un doctorat en sciences infirmières. C’est ce que j’apprécie avec ce nouveau métier : la possibilité d’évoluer dans des domaines étendus. Avant, si on voulait évoluer, il n’y avait que deux options : infirmier anesthésiste et infirmier de bloc opératoire. Contrairement à ces deux fonctions, l’IPA n’est pas une spécialité, il a une approche globale et populationnelle.

 

Qu’est-ce qu’un IPA ?

F. C. : La pratique avancée vise un double objectif : améliorer l’accès aux soins ainsi que la qualité des parcours des patients en réduisant la charge de travail des médecins sur des pathologies ciblées.

C. M. : Le Conseil international des infirmiers (CII) indique que « l’infirmier-ère diplômé-e qui exerce en pratique avancée a acquis des connaissances théoriques, le savoir-faire aux prises de décisions complexes, de même que les compétences cliniques indispensables à la pratique avancée de sa profession ». Concrètement, le décret précise que la pratique avancée recouvre des activités d’orientation, d’éducation, de prévention ou de dépistage ; des actes d’évaluation et de conclusion clinique, des actes techniques et des actes de surveillance clinique et paraclinique ; des prescriptions de produits de santé non soumis à prescription médicale, des prescriptions d’examens complémentaires, des renouvellements ou adaptations de prescriptions médicales.

 

Quel parcours avez-vous suivi pour devenir IPA ?

F. C. : La formation, financée par le CHSM de Rodez, s’est déroulée à la faculté de médecine de Limoges, au CHU Dupuytren. Elle a duré deux ans à raison de 15 jours de cours par mois en présentiel. La première année, c’est un tronc commun permettant de poser les bases de l’exercice infirmier en pratique avancée et la seconde année est centrée sur les enseignements en lien avec la mention choisie parmi cinq : les pathologies chroniques stabilisées et les polypathologies courantes en soins primaires ; l’oncologie et l’hémato-oncologie ; la maladie rénale chronique, la dialyse, la transplantation rénale ; la psychiatrie et la santé mentale ; et les urgences.

 

Les cours théoriques ont-ils été complétés par de la pratique ?

C. M. : Oui, nous avons fait un stage de deux mois en première année et de quatre mois en deuxième année. Je l’ai fait à la maison de santé du Faubourg à Rodez et Florian chez Palliance 12 à Onet-le-Château.

 

Comment avez-vous validé votre diplôme ?

C. M. : Nous avions un mémoire sous forme de revue de littérature à rendre. J’ai travaillé sur la prévention non médicamenteuse dans la prévention de la dépression du post partum et Florian s’est intéressé aux effets du CBD sur les troubles anxieux.

 

Maintenant que vous êtes diplômés, qu’espérez-vous apporter dans vos structures respectives ?

C. M. : Un regard expert.

F. C. : L’idée n’est pas de prendre la place du médecin mais de fluidifier la prise en charge, de réaliser un accompagnement rapproché des patients chroniques stabilisés pour offrir du temps médical aux cas aigus et/ou complexes.

C. M. : Pendant la crise Covid, nous avons perdu de vue certains patients. Nous devons faciliter l’accès à une prise en charge et à un parcours pour éviter les renoncements aux soins qui sont de plus en plus fréquents.

F. C. : Notre mobilité va nous permettre de nous rendre sur les différentes structures du secteur pour proposer un appui clinique aux soignants. Nous pourrons aussi les assister pour monter des projets thérapeutiques ou de formation.

C. M. : Effectivement, 10 % du temps de travail des IPA doit être dédié à la recherche, cela représente deux jours par mois durant lesquels nous pourrons étudier des cas cliniques au cours de réunions pluridisciplinaires par exemple.

F. C. : Il y a un important travail de réseau à mener, en complément de celui que font déjà nos cadres de santé. Pour améliorer le réseau ville-hôpital, coordonner des actions avec les partenaires, etc.

 

Quelles seront vos premières démarches ?

F. C. : Nous allons organiser nos prises de fonction avec nos cadres de santé à la rentrée. Il faudra que nous allions rapidement à la rencontre des médecins dans les maisons de santé mais aussi des pharmacies pour faire de la pédagogie autour de ce nouveau métier encore mal connu.

C. M. : En effet, nous pouvons faire des prescriptions mais les logiciels des offices n’incluent pas les IPA pour le moment ce qui pose un problème pour la délivrance des médicaments aux patients. C’est tout nouveau, tout est à construire !

Propos recueillis par Anaïs Arnal​